Les variétés résistantes pour lutter contre les bioagresseurs

Voltis, Coliris, Lilaro, Sirano, sous ces jolis noms se cachent des variétés de vignes résistantes. De nombreux espoirs sont placés dans leur développement. En effet, une variété résistante au mildiou et à l’Oïdium, c’est plus de la moitié de produits phytosanitaires en moins appliqués dans les vignes françaises. On dit d’une plante qu’elle est résistante lorsqu’elle possède un ou plusieurs gènes de résistance, qui lui permettent un contrôle total ou partiel de l’infection. Pour la vigne, certaines variétés cumulent plusieurs résistances. Phylloxéra des racines et maladies des feuillages et des grappes, les variétés sont moins sensibles aux maladies et donc aux pertes de rendement.


Les attentes de la viticulture française sont en pleine mutation. Si les exploitants recherchent une résistance durable au mildiou et à l’oïdium, les consommateurs, eux, souhaitent que les exploitations diminuent leur recours aux intrants. Les variétés résistantes devront donc permettre une réduction de l’utilisation de produits phytosanitaires et répondre aux nouveaux enjeux dans un contexte de contraintes climatiques croissantes, tout en conservant une quantité et qualité de raisins intéressantes.


Comment mettre au point une variété résistante ? C’est un des enjeux majeurs de la recherche viticole. L’obtention de variétés résistantes utilise l’hybridation et des techniques modernes de sélection.

La grande majorité des variétés de vigne cultivées sont sensibles mais il est connu depuis longtemps que des espèces sauvages apparentées à la vigne cultivée peuvent porter des résistances à différentes maladies. En revanche, ces espèces sauvages portent beaucoup de défauts agro-œnologiques. C’est pourquoi des croisements complexes et successifs sont réalisés entre vignes sauvages résistantes et vignes cultivées sensibles afin de créer de nouvelles variétés qui combinent à la fois résistance aux maladies et qualités agronomiques et œnologiques indispensables pour faire du vin de qualité.

A la fin du processus, les variétés candidates doivent être testées pour un ensemble de caractéristiques.

  • Sélection précoce : semis des pépins issus des croisements puis extraction de l’ADN pour identifier la présence des facteurs de résistance
  • Sélection intermédiaire : Les plantes retenus sont multipliées et plantées afin d’effectuer une première évaluation agronomique et œnologique des variétés.
  • Sélection finale: les meilleures variétés candidates sont expérimentées dans un réseau expérimental

Les meilleures d’entre elles sont exemptes de défauts et la qualité de leur vin est jugée comparable aux variétés traditionnelles témoins. Dans ce processus, de l’analyse de 1000 plantes, on peut espérer obtenir une variété commercialisable.

La vigne produit des composés de défenses au niveau des feuilles et des baies permettant de stopper le développement des maladies. Certains composés préexistent et sont toxiques pour les champignons responsables de ces maladies. Les variétés résistantes sont donc caractérisés par des teneurs plus élevées de ces composées, qui diffèrent selon les variétés.
Ces facteurs de résistances fonctionnent comme de véritables sentinelles capables de repérer l’agent pathogène lorsqu’il envahit une cellule de la plante. L’infection est ainsi signalée très rapidement au système de défense de la plante, qui peut alors intervenir en empêchant la progression du pathogène et en l’éliminant.
Mais les variétés résistantes ne permettent pas un arrêt complet des traitements fongicides. Quelques traitements phytosanitaires sont néanmoins indispensables pour maintenir l’efficacité de la résistance mais également pour protéger la vigne du développement de pathogènes secondaires qui pourraient prendre le dessus et devenir problématiques en l’absence de traitement comme par exemple le black rot ou l’Anthracnose.

Cadre réglementaire autour des cépages résistants ?

Pour pouvoir produire et commercialiser du vin à partir d’une variété résistante, il est nécessaire que les deux conditions suivantes soient remplies pour être inscrit au catalogue officiel et être classé en tant que variété de vigne de raisins de cuve.

Pour être inscrit au catalogue officiel, le cépage doit posséder deux critères : DHS (distinction, homogénéité et stabilité) et VATE (valeur agronomique, technologique et environnementale).
Un classement temporaire permet de planter des parcelles expérimentales sur des surfaces limitées et d’en commercialiser la production en Vin sans indication géographique.


Pour la culture et la production de vin, schématiquement 3 cas à distinguer :
VSIG : pas de limitation (hormis la nécessité de classement)
IGP : intégration dans le cahier des charges justifiée par l’ODG
AOC : intégration dans le cahier des charges (ODG + INAO) ; max 5% de l’encépagement d’une exploitation et max 10% d’un assemblage

Quelles variétés sont et vont être autorisées ?

En 2018, quatre variétés ont été autorisées : artaban, vidoc, floréal et voltis. 5 nouvelles variétés viennent désormais compléter cette liste : coliris, lilaro, sirano, selenor ou encore opalor. Avec 10 autres variétés attendues d’ici 2025, l’éventail de cépages résistants ne cesse de s’étoffer.

Quelles sont les perspectives d’évolution pour ces variétés résistantes
Si la résistance est une méthode qui porte de nombreux espoirs, ils sont néanmoins tempérés par un facteur clé : la durabilité. Pour y répondre, l’association dans un même individu de plusieurs gènes de résistance diminue le risque de contournement de la résistance. Des suivis sur le terrain sont menés pour confirmer la durabilité de la résistante de ces cépages. Aujourd’hui, le suivi de ces parcelles plantées permet également d’avoir des retours sur la conduite à tenir.

Observatoire Nationale du Déploiement des Cépages Résistants (OSCAR), IFV et travaux des Chambres d’Agriculture.
A l’heure actuelle, le black rot est la maladie la plus préoccupante, car, elle émerge avec la réduction drastique des traitements anti-mildiou et anti-oïdium. La résistance à cette maladie est encore peu explorée. Des progrès significatifs sont donc attendus pour le contrôle de cette maladie.


Les variétés INRAE ResDur actuelles n’ont pas été élaborées dans l’objectif d’une typicité particulière. Une étape restant à franchir est l’obtention de variétés résistantes à typicité régionale, très proches des variétés emblématiques de chaque bassin viticole. Des partenariats entre INRAE, l’IFV et les comités interprofessionnels régionaux ont été établis pour mener de tels programmes. Les consommateurs n’ont donc pas de souci à se faire pour la qualité des crus français à venir…

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